dimanche 1 décembre 2024

Decembre

 

 Mois de décembre

 

En décembre, fais du bois et endors-toi.

 


 

Décembre

(Les hôtes)

- Ouvrez, les gens, ouvrez la porte,
je frappe au seuil et à l'auvent,
ouvrez, les gens, je suis le vent,
qui s'habille de feuilles mortes.

- Entrez, monsieur, entrez, le vent,
voici pour vous la cheminée
et sa niche badigeonnée ;
entrez chez nous, monsieur le vent.

- Ouvrez, les gens, je suis la pluie,
je suis la veuve en robe grise
dont la trame s'indéfinise,
dans un brouillard couleur de suie.

- Entrez, la veuve, entrez chez nous,
entrez, la froide et la livide,
les lézardes du mur humide
s'ouvrent pour vous loger chez nous.

- Levez, les gens, la barre en fer,
ouvrez, les gens, je suis la neige,
mon manteau blanc se désagrège
sur les routes du vieil hiver.

- Entrez, la neige, entrez, la dame,
avec vos pétales de lys
et semez-les par le taudis
jusque dans l'âtre où vit la flamme.

Car nous sommes les gens inquiétants
qui habitent le Nord des régions désertes,
qui vous aimons - dites, depuis quels temps ? -
pour les peines que nous avons par vous souffertes.

 

                                                    Emile Veerharen

 

vendredi 1 novembre 2024

Novembre

 

Mois de novembre


Brouillard en novembre, l'hiver sera tendre

 



Novembre

 

Les grand'routes tracent des croix
A l'infini, à travers bois ;
Les grand'routes tracent des croix lointaines
A l'infini, à travers plaines ;
Les grand'routes tracent des croix
Dans l'air livide et froid,
Où voyagent les vents déchevelés
A l'infini, par les allées.

Arbres et vents pareils aux pèlerins,
Arbres tristes et fous où l'orage s'accroche,
Arbres pareils au défilé de tous les saints,
Au défilé de tous les morts
Au son des cloches,

Arbres qui combattez au Nord
Et vents qui déchirez le monde,
Ô vos luttes et vos sanglots et vos remords
Se débattant et s'engouffrant dans les âmes profondes !

Voici novembre assis auprès de l'âtre,
Avec ses maigres doigts chauffés au feu ;
Oh ! tous ces morts là-bas, sans feu ni lieu,
Oh ! tous ces vents cognant les murs opiniâtres
Et repoussés et rejetés
Vers l'inconnu, de tous côtés.

Oh ! tous ces noms de saints semés en litanies,
Tous ces arbres, là-bas,
Ces vocables de saints dont la monotonie
S'allonge infiniment dans la mémoire ;
Oh ! tous ces bras invocatoires
Tous ces rameaux éperdument tendus
Vers on ne sait quel christ aux horizons pendu.

Voici novembre en son manteau grisâtre
Qui se blottit de peur au fond de l'âtre
Et dont les yeux soudain regardent,
Par les carreaux cassés de la croisée,
Les vents et les arbres se convulser
Dans l'étendue effarante et blafarde,

Les saints, les morts, les arbres et le vent,
Oh l'identique et affolant cortège
Qui tourne et tourne, au long des soirs de neige ;
Les saints, les morts, les arbres et le vent,
Dites comme ils se confondent dans la mémoire
Quand les marteaux battants
A coups de bonds dans les bourdons,
Ecartèlent leur deuil aux horizons,
Du haut des tours imprécatoires.

Et novembre, près de l'âtre qui flambe,
Allume, avec des mains d'espoir, la lampe
Qui brûlera, combien de soirs, l'hiver ;
Et novembre si humblement supplie et pleure
Pour attendrir le coeur mécanique des heures !

Mais au dehors, voici toujours le ciel, couleur de fer,
Voici les vents, les saints, les morts
Et la procession profonde
Des arbres fous et des branchages tords
Qui voyagent de l'un à l'autre bout du monde.
Voici les grand'routes comme des croix
A l'infini parmi les plaines
Les grand'routes et puis leurs croix lointaines
A l'infini, sur les vallons et dans les bois ! 

                                                                           Émile VERHAEREN
                              


mardi 1 octobre 2024

Octobre


Mois d'octobre

 

"Octobre est bon s'il est saison"

 


Automne

 

Matins frileux
Le temps se vêt de brume ;
Le vent retrousse au cou des pigeons bleus
Les plumes.
La poule appelle
Le pépiant fretin de ses poussins
Sous l’aile.
Panache au clair et glaive nu
Les lansquenets des girouettes
Pirouettent.
L’air est rugueux et cru ;
Un chat près du foyer se pelotonne ;
Et tout à coup, du coin du bois résonne,
Monotone et discord,
L’appel tintamarrant des cors
D’automne.

                               Emile Verhaeren, 1895


samedi 31 août 2024

Septembre

 

Mois de Septembre

 

"Au mois de septembre, le feignant peu aller se pendre "



Au trente-et-un du mois d'août (bis)
Nous vîm's venir sous l' vent à nous (bis)
Une frégate d'Angleterre
Qui fendait la mer-z-et les flots :
C'était pour attaquer /aller à Bordeaux

Buvons un coup, buvons en deux,
A la santé des amoureux
A la santé du Roi de France,
Et merd' pour le Roi d'Angleterre
Qui nous a déclaré la guerre!


Le Capitain' au même instant (bis)
Fit appeler son lieutenant, (bis)
" Lieutenant, te sens-tu capable :
Dis-moi te sens-tu, assez fort
Pour prendre l'Anglais à son bord ?"


Le Lieutenant, fier-z-et hardi (bis)
Lui répondit: " Capitaine oui! (bis)
Faite branle-bas à l'équipage
Je vais hisser notre pavillon
Qui restera haut, nous le jurons"


Le maître donne un coup d'sifflet (bis)
Pour faire monter les deux bordées (bis)
Tout est paré pour l'abordage
Hardis gabiers, fiers matelots
Braves cannoniers, mousses et petiots


Vir' lof pour lof en arrivant (bis)
Nous l'attaquâm's par son avant (bis)
A coups de haches d'abordage,
De piques, de sabres, de mousquetons,
Nous l'avons mis à la raison


Que dira-t-on de lui tantôt (bis)
A Brest, à Londres et à Bordeaux (bis)
De s'être ainsi laisser surprendre
Par un corsaire de six canons,
Lui qu'en avait trente et si bons 


Buvons un coup, buvons en deux,
A la santé des amoureux
A la santé des vins de France,
A qui nous devons le succès
d'être vainqueur sur les Anglais!